L’Onda – Pietra Piana – Manganu [6/10] 04-06-2010

Troisième journée double et variante par les crêtes.

Après une « nuit toboggan », humide et froide d’un froid transperçant le réveil sonne 5 heures et nous nous préparerons lentement… A 7 heures le groupe d’instits se réveille tout juste quand nous partons alors que le groupe des 2 pompiers et du raideur attaquent leur déjeuner, leur 4ème ami est déjà parti depuis longtemps tentant de prendre assez d’avance pour parvenir à les suivre sur le reste de l’étape…

Lever de jour sur mer d’or

Nous remontons une partie de la pente descendue hier soir pour arriver au refuge, Atha part très très lentement pour tester et ménager sa cheville douloureuse.
Un vent frais souffle au passage du petit col (Bocca d’Oreccia), le soleil se fait encore attendre, quelques nuages le masquent encore. On montera longuement sur les alpages défoncés par les troupeaux avant d’atteindre les crêtes de la Serra di Tenda vers 1990m. Le topo déconseille cette variante en fin de saison si des névés persistent et effectivement quelques pas encore gelés s’avèreraient périlleux… Là les derniers névés commencent à fondre sérieusement, vigilance, il faut tester chaque pas avant de peser sur la neige… On croise une dizaine de groupes mais personne ne semble emprunter cette variante dans le même sens que nous. Les vues panoramiques offertes par ce passage technique en crête sont magnifiques…

Après la pointe de Pinzi Corbini la crête commence à redescendre et les amoncellements de blocs laissent place à un sentier facile sur un mixe herbe-rochers.

L’ile de Montecristo

Peu après la pointe Murace le beau refuge de Pietra Piana posé sur sa petite terrasse et plus bas, bien plus bas une bergerie apparaissent… Nous sommes scindés en deux Lucho et Ben en tête, Nico puis Atha suivent à une bonne distance.

Peu avant le refuge une bifurcation Nico crie à Atha 20m en arrière : « J’ai retrouvé le GR » tout ça est normal nous étions sur la variante… Arrivé au refuge Lucho et Ben (déjà fourrés dans les rayons ravitaillement de l’épicerie du refuge) s’étonnent de ne pas voir arriver Nico avec Atha… Une bonne demie heure après avoir commencé à le chercher on verra une fusée remonter les 250m de dénivelé depuis les Bergeries… Emporté par l’élan et n’ayant pas vu le refuge, un peu masqué sur la fin du sentier, Nico s’était laissé glissé jusqu’aux bergeries…

Le refuge de Pietra Piana

L’accueil et la zone autour du refuge sont forts sympathiques mais nous n’y resterons que le temps d’avaler les 2 à 6 sandwiches, par personne, au fromage ou au saucisson que chacun à commandé, nous ne sommes qu’à mi étape de notre journée. Cette première partie technico-ludique passe bien et annoncée en 4h50 nous l’avons parcouru en un peu moins de 3h.

Après notre pause prolongée, attente et recherche de notre Nico égaré oblige, nous repartons vers la seconde étape de la journée. Sur cette étape il nous a été conseillé, vu la période et l’état des névés, de nous méfier. En effet le danger sur les névés, un peu comme sur les crevasses est pernicieux et peut être fatal… En hivers aucun risque avec les températures négatives l’eau liquide n’existe pas… En fin de printemps les températures remontent, les neiges fondent, l’eau coule, créant sous les névés des cavités parfois hautes et pouvant céder à tout moment au passage d’un randonneur par exemple… Le risque est au mieux de se faire une entorse ou de se casser une jambe voire deux ; au pire de passer complètement au travers et de rester coincé après avoir chuté et glissé sur la paroi sous le névé, une sorte de crevasse oblique, un piège qui sans assistance rapide peut évidement se révéler mortel… J’espère que vous avez peur pour nous là, j’essaye de faire monter la tension…

Nous passerons une bonne partie de l’après midi sur des névés…

On ne repart pas trop tard, vers 12h00, car nos informations indiquent que la météo devrait encore nous réserver des averses pour cette après midi et en effet le temps se couvre rapidement…

Le retour du brouillard

On passe tout de suite un premier névé juste au dessus du refuge qui nous fait franchir une première ligne de crête… S’en suivront une bonne vingtaine dans l’après midi… Dans un long névé nous menant à la Bocca Muzzella à 2200m nous croisons des randonneurs qui semblent bien fatigués, ils avancent lentement et sont partis depuis de longues heures ce matin du refuge de Manganu… Malgré le ciel voilé le soleil et la réverbération sur la neige font monter critiquement la température…

Ici encore les vues sont magnifiques…

Au détour d’un névé

Un long névé

Derrière la Bocca Muzzella nous traversons plus ou moins à plat un long névé qui nous amène au col de Rinoso en dessous le lac de Rinoso bleu-turquoise encore bien  gelé…

Le lac de Capitellu encore bien bleu

Après le col de Rinoso nous découvrons le lac de Melo qui vers 1700m est lui complètement entré dans le printemps… En face de nous nous voyons le passage de la brèche de Capitelu mais il reste encore pas mal de chemin avant d’y parvenir… Une première descente dans les blocs, une remonté sur une gros névé, un long passage en crête sur le versant que l’on ne vois pas d’ici et enfin une grosse remonté sur le névé pour déboucher dans la brèche…

Le lac de Melo

Donc dans l’ordre la descente dans les blocs passe vite et nous voici déjà dans un long névé sous lequel coulent de nombreuses petites rivières de fonte… Il faut rester vigilent c’est là que le névé pourrait s’ouvrir… Le clapotis de l’eau sous nos pieds et les trous béants ne laissent pas l’ombre d’un doute…

Nous atteindrons sans encombre, vers 2050m, la crête à la Bocca a Soglia. Jusqu’au sud du lac de Mélo nous évoluerons sur un sentier de crête sans réelle difficulté, quelques pas techniques demande de l’attention, mais rien de bien méchant… Phénomène intéressant la crête marque une frontière météorologique… Les nuages remontant la vallée à la faveur d’un vent de sud sont bloqués et refoulés par un vent du nord, selon le coté de la crête nous avons donc droit au brouillard ou au soleil…

Pile au sud du lac de Capitello encore pris par les glaces, on découvre un homme montant seul au plus raide de la pente… Il a l’assurance et le rythme lent des hommes de montagnes… On l’aide en lui prenant simplement ses bâtons sur un pas nécessitant les mains. Juste après alors que Lucho et Ben sont aux prises avec une chaine, le gars prend la variante sans chaine et nous passe comme si de rien… Au dessus Ben lui emboite le pas et attaque la dernière ascension sur le névé alors qu’Atha n’a pas encore attaqué la chaine…

Le montagnard monte, il profite des traces déjà bien faites, mais il a définitivement l’aisance de l’expérience et file bon train. Le passage est superbe. Ce gros névé est impressionnant, à droite du gaz et 300m plus bas on voit seulement le lac… Le moindre faut pas pourrait nous entrainer dans la pente et la glissade serait courte avant d’atteindre le tremplin vers le lac… Les traces sur le haut du névé, juste sous la paroi rocheuse, sont bonnes et même Atha en chaussures de trails (ouvertes d’usure…) ne glissera pas une fois…

La brèche, Bocca à le Porte 2220m, est finalement rapidement atteinte, c’est ici le point culminant du GR20… Le montagnard s’est arrêté, il caresse son iphone et nous discuterons un bon moment avec lui… François est guide pour Touraventure, il est là en repérage pour mener un groupe ici dans quelques jours… On récoltera encore de bons conseils, notamment pour le cirque de la solitude – « Vous êtes sportifs, débrouillards, vous passerez… » – avant de repartir pour les 2h30 qu’il nous reste à parcourir avant le refuge de Manganu…

Bocca a Soglia frontière météo

François repart en sens inverse, il a vu ce qu’il avait à voir ; quant à nous, nous passons la brèche et attaquons la descente d’un long névé de près de 300m de dénivelé… Dans ce sens la progression est rapide, tout en glisse debout, assis sur les fesses, tous les styles sont bons pour dévaler rapidement… Les lunette de soleil d’Atha en profitent pour sauter en marche…

François de Touraventure croise un randonneur sous la Brèche de Capitellu

Sur le bas on calme quand même le jeux car le névé commence à s’ouvrir en dessous l’eau coule à flots… On passe un petit pont de neige d’à peine 50cm de large/haut, au dessous 2/3m de vide et la rivière…

Le pont de neige résistant sous les pas de Nico

La fin de la journée suit la rivière et il ne nous faudra au final qu’une heure pour rallier le refuge depuis la brèche, le névé nous a fait gagner beaucoup de temps… Quelques zones de chaos, des « marécages » et la traversée de la rivière… Cette double étape est unanimement la plus belle que nous ayons eu jusque là… Toutes les douleurs en ont été oubliées… Nous sommes tous très heureux de cette journée, d’autant que nous n’avons pas eu de pluie…

Le refuge propose une large terrasse et offre une belle vue sur la vallée que nous parcourrons demain. La zone de bivouac est large, ça fait un peu camping, mais il n’y a pas vraiment de zone plate…

A l’occasion d’une « discussion de lessive » Atha trouve un randonneur venant du nord qui peste contre ses bâtons, il ne parvient pas à les utiliser correctement ailleurs que sur la neige, il le gêne plus qu’autre chose… Ce sont des décathlon 2 brins, un peu tordus, encombrants, lourds et basiques, mais presque neufs, y compris les pointes… Le deal est scellé Atha troquera ses vieux bâtons 3 brins, « antishok », aux pointes rondes contre ceux-ci, voici deux randonneurs contents…

Le même rituel bien installé maintenant se déroule, douches, lessives, bière et repas au refuge, étirements et couchage le tout agrémenté de discussions et d’échange d’infos avec les autres randonneurs…

Après le repas Atha passera de longues minutes assis sur un rocher à coudre à la frontale sa chaussure droite déjà bien ouverte depuis 2/3 jours… La réparation de fortune si elle est menée à bien devrait tenir, une couche de strap à l’intérieur, une à l’extérieur le tout cousu… Mais la petite aiguille rendra l’âme en court de route, l’essentiel est quand même recousu…

Chrono

Étape 1

  • Départ : 7h00
  • Arrivée : 10h20
  • Pauses : ~0h30
  • Temps de marche : 2h50
  • Dénivelé positif : 900
  • Dénivelé négatif : 500
  • Kilomètres : ~10Km
  • Temps topo :  5h15

Étape 2

  • Départ : 12h10
  • Arrivée : 16h30
  • Pauses : ~0h30
  • Temps de marche : 3h50
  • Dénivelé positif : 590
  • Dénivelé négatif : 830
  • Kilomètres : ~10Km
  • Temps topo : 6h00

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